Un terrain à soi / Terrains désignés / Mobilisations environnementales et luttes voyageuses

Témoignage, portfolio et article, Ballast, avril 2021

Anna Lagréné-Ferret a vu le jour en 1942, en Belgique. Quelques mois après sa naissance, sa famille a échappé de peu à la déportation dans les camps nazis. Après avoir été assujettie à un carnet anthropométrique de « nomade », elle s’est trouvée classée par l’administration française dans la catégorie des « gens du voyage ». « J’aime mieux dire que je suis une Française avec sa culture manouche », objecte-t-elle. Depuis plusieurs années déjà, elle vit sur une « aire d’accueil » en Bretagne. Elle raconte les difficultés de son quotidien et les préjugés que subissent les voyageurs. Et puis ses rêves, aussi.

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Au mot de « gitan », les clichés du « moustachu à la guitare » ou de « l’enfant pieds nus à la cigarette » surgissent. C’est sur ce terrain que de nombreux artistes comme Koudelka, Mathieu Pernot ou Alain Keller ont fait leurs armes. Le photographe Valentin Merlin a choisi d’en prendre le contre-pied : personne sur les photos. Des murs, des palissades, des barrières, du barbelé, du béton : c’est ce qui constitue les « aires d’accueil ». Il nous dit par ce travail, avoir « voulu construire une archive de « l’encampement » des gens du voyage en France, mais aussi fabriquer des preuves ». Preuves que l’administration assigne à résidence des citoyens français dans des lieux hostiles à toute forme de vie. Si la photo peut accompagner les luttes voyageuses, c’est en montrant que les autorités locales de Petit-Quevilly, de Saint-Germain-en-Laye et de Marseille forcent des familles à vivre dans des zones à haut risque industriel. Au fil de cette série commencée en 2015, on peut saisir pourquoi certains voyageurs appellent ces aires d’accueil des « terrains désignés ». Subissent-ils pour autant ces lieux ? Il n’en est pas question : ils les apprivoisent et les combattent aussi. Parfois, on aperçoit le « bureau » — le lieu du pouvoir — brûlé. Ou encore des restes de morceaux de barricades. Luttes silencieuses, mais visibles.

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Revenant sur six années d’enquête et de vie partagée avec les habitants des aires d’accueil de « gens du voyage », l’ethnologue Lise Foisneau analyse les conséquences de l’incendie de Lubrizol sur les luttes voyageuses. Paradoxalement, les récentes batailles environnementales ont jeté un voile d’ombre supplémentaire sur les multiples atteintes aux droits fondamentaux subies par les collectifs romani et voyageurs. Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, les « gens du voyage » n’ont cessé de combattre la condition qui leur est faite : interdictions de stationnement, expulsions, terrains désignés, destructions de lieux de vie. Comment les sciences sociales peuvent-elles objectiver leurs résistances à cet encampement ordinaire ?

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