Quelle égalité pour l’école ?
Ouvrage et entretien avec Loïc Szerdahelyi, janvier 2023
L’éducation à l’égalité est une thématique largement abordée au sein de notre société. Cela signifie-t-il pour autant qu’il y a une réelle prise de conscience ? Que les politiques mises en place mettent en œuvre des « modalités » suffisantes pour y parvenir ?
La question politique est au centre de l’ouvrage. En posant la question Quelle égalité pour l’école ? ce livre collectif valorise l’articulation entre le pédagogique et le politique. L’idée est de dépasser la légitime préoccupation du « comment faire – comment enseigner en égalité ? » pour passer au « pourquoi/pour quoi – quel projet d’égalité voulons-nous porter ? ».
(…) Il faut d’abord reconnaître une prise de conscience, un volontarisme politique pour prendre en charge l’objectif d’égalité. La réflexion politique a évolué en passant de l’énoncé du principe à des propositions d’actions, des mises en œuvre concrètes. On peut en ce sens observer une succession de conventions signées depuis les années 80, où la question de l’égalité des sexes est centrale. (…)
Une autre manière de voir les choses m’amène à vous répondre que ce n’est pas si simple. On peut justement questionner la récurrence de ces conventions, puisqu’elles sont généralement signées tous les cinq ans. Certes, il existe une nécessaire actualisation en fonction de l’évolution des connaissances. Mais n’est-ce pas aussi le signe d’une certaine inefficacité, d’un affichage politique dont les actions n’arrivent que partiellement à atteindre leur cible ? C’est tout l’enjeu du livre que de mettre en tension cet aspect à travers l’articulation entre le politique et le pédagogique sur la question de l’égalité.
Vous évoquez une « égalité sans condition » et une « égalité sous conditions ». Quelle est la nuance ?
Ces expressions sont issues des travaux de Réjane Sénac en sciences politiques et rejoignent les conclusions des recherches menées en sciences de l’éducation. En effet, l’école produit et reproduit une égalité sous conditions. On parle d’une « égalité sous conditions » lorsque les pratiques – à différents niveaux – s’éloignent du principe républicain censé assuré l’égalité sans distinction de sexe, de classe sociale, d’origine ethnique, de sexualité. Dans ce cadre-là, l’égalité est conditionnée en fonction de principes de justification et négociée par rapport à ce qu’elle peut générer comme plus-value. Dans son chapitre « Pour une mixité plus égalitaire », Nicole Mosconi montre par exemple que « l’égalité des chances à l’école signifie une égalité sous conditions de résultats scolaires et de comportements conformes aux normes de la vie scolaire, ce qui revient à imposer une éthique utilitariste de la performance ».
D’où l’idée de faire un pas de côté et de se projeter vers une égalité sans condition. L’expression est, peut-être, un peu polémique comme l’observe Marie Duru-Bellat en conclusion du livre. L’égalité sans condition est un horizon politique de non-domination structurelle et relationnelle. Il s’agit ici de se positionner entre ce qui est et ce qui pourrait être, de considérer les élèves dans ce qui les unit, de les considérer comme des semblables. Les différents chapitres du livre mettent en lumière plusieurs principes d’action pour porter une égalité sans condition. (…)
Entretien intégral sur le site du Café pédagogique
Présentation de l’ouvrage sur le site des éditions L’Harmattan