Lettres de l’Observatoire de l’état d’urgence sanitaire et du confinement

La Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) vient de mettre en place un Observatoire de l’état d’urgence sanitaire et du confinement visant à contrôler la mise en œuvre des mesures coercitives qu’autorise cet état d’exception et à évaluer les éventuelles violations des droits et libertés qui en résulteraient.

Lettre #1 parue le 6 avril 2020 (2 pages)

Le premier constat est qu’aucun plan général n’a été préparé en amont pour prévoir une situation sanitaire de cet ordre et en particulier son impact sur les personnes les plus précaires. Durant ces dernières semaines, l’accompagnement et la prise en charge de ces populations ont été laissés à la charge quasi exclusive des associations, sans coordination nationale. Ce constat est d’autant plus amer qu’il reflète une fois de plus que les mesures générales prises dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire l’ont été en prenant comme cadre de référence une certaine catégorie de citoyens – salarié, vivant en couple ou en famille, ayant accès à internet et maitrisant bien la langue française – qui ne saurait refléter la diversité de la population, laissant de côté celles et ceux qui ne rentrent pas dans cette catégorie. Or, ignorer ces réalités, c’est à la fois prendre le risque de multiplier les contaminations, mais aussi d’accroitre les inégalités sociales et de laisser bon nombre de nos concitoyens sur le bord de la route.

Lettre  #2 parue le 15 avril 2020  – la protection de l’enfance (4 pages)

Les foyers d’accueils sont confrontés à des situations très difficiles : maintenir pendant plusieurs semaines des enfants et des adolescents, dont certains en grande détresse, confinés, sans scolarisation, est un véritable défi pour les équipes, surtout dans un contexte de manque de personnel. Les espaces réduits, surtout en milieu urbains, et dans certains cas la suspension des liens avec la famille pendant le temps du confinement, peuvent mener à des tensions et des violences.

La Commission s’inquiète aussi de la discontinuité du service de la prévention et de la protection de l’enfance dans de nombreux départements. La CNCDH estime que les personnels des services de prévention et de suivi devraient être dotés des outils de communication adaptés à un travail à distance. La CNCDH entend rappeler l’importance du maintien des liens familiaux.

Deux zooms :

  • les droits des enfants et des parents dans la procédure judiciaire ;
  • les droits fondamentaux des mineurs non accompagnés.

Lettre #3 parue le 21 avril 2020 : le logement (3 pages)

Aujourd’hui, 4 millions de personnes vivent dans un logement indécent ou sont sans-abri – et leur situation est particulièrement critique depuis la mise en place de mesures pour endiguer l’épidémie de Covid-19, en particulier le confinement. Les informations reçues par la Commission, via ses associations membres, montrent que les inégalités sociales sont exacerbées par la crise sanitaire et aggravent les difficultés liées au mal logement.

Vivre en situation de mal logement, à cause d’un logement trop petit, surpeuplé et/ou insalubre est déjà source de souffrances et de difficultés quand on peut passer une grande partie de sa journée en dehors. Mais en situation de confinement, les personnes, vivant seules ou avec leurs proches, se retrouvent prisonnières de ces logis indignes, faisant peser des risques sur leur santé psychique et physique, nombre de ces logements étant insalubres.

Lettre #4 parue le 24 avril 2020 : les personnes en situation de pauvreté (3 pages)

Aujourd’hui, 8,9 millions de personnes pauvres (vivant avec moins de 1.041 euros par mois), dont 2,2 millions de personnes en situation d’extrême pauvreté (moins de 694 euros par mois) – pour lesquelles le respect effectif des droits fondamentaux est déjà fragile en temps normal – se retrouvent dans des situations dramatiques.

Les informations reçues par la Commission, via ses associations membres, montrent que les inégalités sociales sont exacerbées par la crise sanitaire en France métropolitaine et dans les Outre-mer. Cette situation précarise davantage les personnes en situation de vulnérabilité ou marginalisées qui doivent faire face, au quotidien, à des difficultés plus nombreuses et plus importantes. Les familles monoparentales et les jeunes de moins de trente ans sont particulièrement concernés.

Lettre #5, parue le 6 mai 2020 : l’accès aux soins (5 pages)

A la lecture des diverses informations reçues, la Commission nationale consultative des droits de l’homme s’inquiète de ce que la gestion de la crise sanitaire due au Covid-19 révèle sur l’état de notre système de santé, et en particulier sur l’effectivité de l’accès aux soins pour tous, sans discrimination. La crise actuelle accentue la tension du système de santé et révèle avec une intensité nouvelle les inégalités et ruptures de droits dans l’accès aux soins et les parcours de santé. Certains phénomènes sont spécifiques à la crise actuelle, mais d’autres témoignent d’une aggravation de difficultés déjà connues et documentées, notamment dans les précédents avis de la Commission.

La Commission est particulièrement inquiète de l’ampleur de la fracture sociale dans l’accès aux soins révélée par la crise sanitaire. Ainsi, plusieurs éléments montrent une plus grande vulnérabilité des personnes en situation de précarité face au Covid-19. Parmi les personnes qui ont dû continuer à travailler en dehors de leur domicile, on retrouve de nombreux emplois précaires et, ou, mal rémunérés. Leur nombre a été multiplié par le fait que le Gouvernement n’a pas défini les secteurs essentiels, laissant de fait les entreprises continuer ou reprendre leur activité, exposant les travailleurs au risque de contamination dans les transports ou sur le lieu de travail, quand les protections nécessaires n’étaient pas fournies.

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