Esprit de justice : retour sur les émeutes urbaines de juin 2023
Série de 5 podcasts, France culture, novembre 2023
Les crises se succèdent à un rythme tel qu’il nous prive du temps et du recul nécessaires pour les comprendre. Ainsi en est-il des émeutes de la fin juin 2023. Que nous est-il arrivé ? Comment d’abord nommer ces événements : réaction aux violences policières ? Émeutes avec son lot de pillages ? Révolte politique ? Immense colère contre une France rejetante ? Punition des institutions ? L’émission Esprit de justice prend le temps d’y revenir en 5 épisodes.
Épisode 1/5 : La vidéo, mèche médiatique des violences
Tout a commencé par la vidéo virale de la mort en direct de Nahel qui a mis le feu aux poudres. C’est ce qu’il est désormais convenu d’appeler l’effet « Rodney King », du nom de cet Afro-américain battu par la police de Los Angeles, un soir de 1991, qui déclencha des émeutes, non qu’un tel passage à tabac soit exceptionnel, mais parce que, pour la première fois, la scène avait pu être filmée. Quiconque, muni d’un téléphone portable, détient désormais, dans sa poche, une arme pour faire sortir de la clandestinité les pratiques honteuses du pouvoir. Ce régime d’omnivisibilité nous transforme tous à la fois en témoin de l’injustice, en membre d’un immense jury, voire en justiciers.
- Charlotte Recoquillon, géographe, journaliste spécialiste des Etats-Unis
- Ulrike Lune Riboni, chercheure en Sciences Sociales dans le domaine des médias
Épisode 2/5 : La propagation de la violence
Les crises se succèdent à un rythme tel qu’il nous prive du temps et du recul nécessaires pour les comprendre. Comment qualifier cette violence ? Qu’y a-t-il d’inédit dans ces émeutes ?
- Dominique Boullier, sociologue et spécialiste des technologies cognitives et des propagations
- Marwan Mohammed, sociologue
Épisode 3/5 : Les relations des jeunes et de la police : entre défi, inévitabilité et incurie
Ces émeutes, déclenchées par une violence policière, ont posé de manière évidente et paroxystique la question des rapports entre la police et les jeunes des cités. Mais est-ce une cause ou un symptôme ? Les deux probablement. Que la police ait besoin de revoir sa doctrine d’intervention (comme de maintien de l’ordre) semble une évidence et cela nous concerne tous – les populations concernées au premier chef devant être associées à cette élaboration. Il faut néanmoins se garder d’une représentation manichéenne de ces rapports qui serait en quelque sorte une allégorie des rapports entre un pouvoir brutal et des jeunes, nouveaux « damnés de la Terre. »
- Fabien Jobard, politiste
- Kamel Boukir, sociologue et traducteur
- Sylvain Le Bail, ancien CRS qui a été major, formateur et syndicaliste
Épisode 4/5 : Quelle est la dimension politique des émeutes ?
Les émeutes ont suscité une sorte de panique morale dans la société, elles ont été immédiatement interprétées, voire surinterprétées, chacun y voyant une confirmation de ses hantises ou de ses espoirs : le début d’une révolution pour certains (peu nombreux), une remise en cause du pacte républicain pour d’autres (plus nombreux), voire d’un imaginaire de la guerre. Une guerre plus fantasmée que pratiquée qui en dit long sur l’effondrement de l’offre politique. Quelle issue politique pour transformer la colère en action ? La violence demande en effet moins à être contenue que canalisée, élaborée par un discours. Une autre hypothèse, plus pessimiste, serait de voir dans ces émeutes l’aboutissement anomique de notre modernité.
- Raffaele Alberto Ventura, philosophe, journaliste et essayiste
- Fabien Truong, sociologue, réalisateur et auteur
Épisode 5/5 : Et maintenant, que faire ? Une réponse à la hauteur de l’événement
Les différents regards que nous avons portés sur les émeutes ont montré à la fois ce que ces émeutes avaient de récurrent (notamment depuis 2005) mais aussi ce qu’elles avaient d’inédit. Reste à se demander ce qu’il faut faire maintenant.
- Hélène Geoffroy, ancienne Secrétaire d’Etat à la Ville, en charge de la lutte contre les discriminations
- Youssef Badr, magistrat, fondateur et président de l’association La Courte Échelle
- Reda Didi, délégué général de l’association Graines de France